Complexité du diagnostic des maladies allergiques :

Explications pour les patients

qui se disposent à consulter un allergologue

 

L'allergologue dispose de plusieurs moyens de diagnostic : il est important de les utiliser dans un ordre logique

1. Avoir une claire connaissance des symptômes par l'examen (de la peau, auscultation, explorations respiratoires enregistrant les débits et volumes courants) ou par l'interrogatoire, ou à l'aide de photos prises par le patient.

2. Un interrogatoire détaillé

  • selon la règle : « où ? quand ? comment ? pourquoi ? » précisant les circonstances du symptôme, la durée si affection chronique
  • relevant toujours les médicaments associés soit quotidiens soit peu avant le symptôme
  • informant sur l'environnement (habitat, extérieur, style de vie, alimentation courante, causes de fatigue ou de stress, séjours en pays étrangers ...
  • demandant au patient selon les cas : carnet de santé, courriers médicaux et CR d'imagerie, d'examens biologiques, fiches d'anesthésie, doubles d'ordonnances, photos.
  • relevant les maladies familiales et personnelles (toutes pathologies allergiques et non allergiques)
  • et prêtant attention aux remarques qu'a pu faire le patient dans la vie courante

si le patient est venu de lui-même, sans avis médical préalable, et que les symptômes ou l'affection ne sont manifestement pas de nature allergique, l'allergologue est en droit de ne faire aucun bilan.

3. les tests cutanés dits « immédiats »

ne peuvent être faits si le patient est sous anti-histaminiques !

Ils sont interprétables au bout de 15-20 minutes

  • s'ils sont positifs ils témoignent d'une sensibilisation c'est-à-dire d'une réponse immunologique (biologique) : ils ne prédisent pas l'allergie c'est-à-dire le symptôme (ou : la maladie allergique). Autrement dit : ils confirment un diagnostic clinique, ils ne prédisent pas.
  • S'ils sont négatifs : si on recherche une allergie à un médicament, ils ne permettent pas d'éliminer une allergie. S'il s'agit de tests aux allergènes aériens ou alimentaires, ils représentent « un instantané ». Ils ne permettent pas d'assurer que la situation sera toujours la même ; le sujet peut se sensibiliser ultérieurement.

4. les tests sanguins

  • s'adressant aux IgE spécifiques (les anticorps allergiques)
  • ne devraient être faits que si suspicion par l'interrogatoire, ou bien après tests cutanés. En effet un sujet qui a un terrain allergique peut avoir des anticorps allergiques sans aucun symptôme en dépendant. L'allergologue choisit couramment, selon les cas, des tests unitaires à un allergène, à plusieurs, ou dans des cas particuliers, un test évaluant les IgE spécifiques à 112 allergènes.
  • Il faut savoir que ces tests sont sans objet pour certaines allergies : certaines ne « passent pas » par des anticorps et seuls des tests cutanés particuliers (patch tests et patch tests d'atopie) en feront le diagnostic. Ces tests sont « lus » au bout de 48h à 96h.
  •  S'adressant à des IgG spécifiques : tests sans intérêt diagnostique car les manifestations allergiques n'en dépendent pas. Ce pourquoi ils fleurissent sur internet et ne sont pas remboursés par la Sécurité Sociale ! Ils sont parfois proposés par des médecins non allergologues...
  •  D'autres tests deviennent assez courants. En cas de réaction sévère (anaphylaxie) l'allergologue demande un dosage de tryptase, pour éliminer une maladie rare (mastocytose).

5. Tests d'exposition aérienne ou conjonctivale ou nasale (allergènes aériens, certains allergènes professionnels) ou par voie orale (aliments)

Ces tests ne sont envisagés que lorsque la sensibilisation est établie à un allergène mais que la relation avec les symptômes n'est pas certaine, ou bien mérite d'être affirmée (certaines allergies professionnelles) ou bien quand il est utile, dans une allergie alimentaire, d'évaluer le seuil (la quantité) réactive ce qui oriente vers le type de conseils.

6. Suivi évolutif

Un certain nombre de maladies allergiques (respiratoires, alimentaires...) sont chroniques. Elles méritent un suivi évolutif et un contrôle de l'efficacité du traitement institué et des conseils prodigués. Selon les cas, le suivi est annuel, ou bisannuel, ou plus fréquent. La consultation de contrôle peut en rester à la consultation ou additionner une exploration respiratoire ou/et des tests cutanés ou/et une prise de sang...Une lettre du médecin de famille est toujours utile.

7. Education thérapeutique

Dans de nombreuses affections allergiques (asthme allergique, allergies alimentaires), une éducation thérapeutique est préconisée. Outre celle qui est faite au cours des consultations les patients doivent savoir qu'il existe dans de nombreux Centres Hospitalo-Universitaires des « Ecoles de l'atopie » (ou des « Ecoles de l'asthme ») particulièrement utiles pour les familles d'enfants allergiques alimentaires ou/et asthmatiques. Les pharmaciens (montrant le fonctionnement des dispositifs pour médicaments inhalés, la façon de se servir des auto-injecteurs d'adrénaline), les associations de patients allergiques, apportent leur concours. Le but est toujours de maitriser la maladie et de rendre le patient autonome autant que possible.

8. Documents utiles remis par l'allergologue

  • Projet d'accueil individualisé en milieu scolaire et trousse d'urgence
  • Protocole de soins d'urgence et trousse d'urgence
  • Prescription d'une « désensibilisation » et schéma thérapeutique choisi
  • Carte d'allergie (surtout utile en cas d'allergie médicamenteuse) mentionnant les évictions et les médicaments substitutifs proposés
  • Signalement au SAMU de patients à haut risque de réaction immédiate sérieuse
  • Double du Compte-Rendu adressé au médecin traitant

La médecine moderne est la médecine des 4 P : Participative (reposant sur l'échange d'informations entre patient et allergologue), Préventive (nécessitant la fréquentation des « Ecoles » précitées), Personnalisée, et finalement Prédictive (dans l'idéal mais les biomarqueurs ne sont pas encore identifiés sauf dans le cas de l'allergie à l'arachide dont le diagnostic prédictif est réalisé par un certain taux d'IgE spécifiques à Ara h 2).

Professeur D.A MONERET-VAUTRIN

Faculté de Médecine de Nancy

Université de Lorraine